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Plaider la cause du climat et de la transition écologique
Instantanés de Tech for Climate 2023

Je me suis rendu à la conférence Tech 4 Climate ce 14 juin. Organisée gratuitement par Constellation. On peut demander les futures replays (gratuits) à partir du site.

Lien vers le programme de cette année.

Les neuf limites planétaires — on en a beaucoup parlé dans cette journée. Autrement dit : il n’y a pas que le climat.

NB : pas de viande au menu du déjeuner de cette journée mais du poisson et des crevettes. Pas de féculents mais beaucoup de légumes. Pour une fois, du bon Dalloyau.

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Le Climat et l’eau, où en sommes-nous ?

Emma Haziza, hydrologue, chroniqueuse France Info

Été 2022 : 1300 communes en manque d’eau contre seulement 2 lors de la canicule de 2005.

Les anomalies climatiques se multiplient et s’allongent.

La hausse des températures accélère le cycle de l’eau et renforce la violence des orages.

Dans le meilleur des cas, seul 9% de l’eau tombée sur le sol va dans les nappes phréatiques. Mais les sols ont massivement artificialisés, tassés ... Nous consommons 5000 à 7000 litres d’eau (douce) par jour par personne, sans nous en rendre compte, à travers tous les objets (vêtements : le coton demande beaucoup d’eau ; il faut de l’eau pour produire de l’énergie ...) et aliments que nous utilisons ou consommons.

L’eau est utilisée dans tous les processus, trop. Trop de forages. On extrait de l’eau comme on extrait du pétrole.

Chine : des usines s’arrêtent faute d’électricité, car pas assez d’eau dans les barrages.

Dans les grandes plaines américaines, il faudrait 2500 ans pour reconstituer les nappes phréatiques.

Si vous avez beaucoup d’argent, vous aurez toujours bcp d’eau parce que avec l’argent vous aurez de l’électricité, et vous pourrez désaliniser.

Déforester en Afrique réduit l’eau qui pleut sur l’Amazonie.

L’arbre est le meilleur des climatiseurs : il consomme 1000 litres d’eau en moyenne par jour et la restitue. Il permet de recréer la goutte d’eau.

La où on respecte les terres, l’eau revient et reprend sa place. Même les sources taries reviennent. La nature est résiliente à condition qu’on la remette entre les mains de ceux qui la respecte.

Tout est lié au réchauffement climatique et plus largement à l’écologie. Derrière chaque chose qu’on achète, chaque aliment qu’on mange, se cache un milieu, une biodiversité. Par exemple, derrière manger de la viande rouge se cache un élevage extensif qui a besoin de beaucoup de terres et d’eau.

Résumé graphique de la présentation d’Emma Haziza, par Nathalie Van Volsom (Constellation)

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Il n’est pas idiot, comme plusieurs astronautes, de considérer la Terre comme minuscule, brillante mais fragile, comme une oasis de vie dans l’immense vide spatial. De la considérer comme une personne à qui on parle.

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Quelles technologies à l’aube de la transition écologique ?

Côme Girschig, conférencier écologie et société

On est fasciné par la technique. Et une technologie très individuelle (on est plus fasciné par le dernier iPhone à 3 appareils photos qu’on a dans sa poche que par la conquête de l’espace).

On fait des choix technologiques sans connaître les racines de la production derrière.

Chaque objet, même un simple un grille-pain, met en jeu des chaînes technologiques et matérielles dont on n’a aucune idée.

Les choix technologiques nécessitent d’anticiper car après on est verrouillé.

Edgar Morin Introduction à la complexité : la complexité, c’est le défi pas la réponse. Exemple des smartphones : ils sont tellement complexes qu’ils en sont devenus difficilement recyclables.

Hartmut Rosa, sociologue allemand et théoricien de l’accélération sociale : accélération technique => accélération individuelle => accélération sociale. Tout cela étant extrêmement intensif en énergie.

Notre rapport au temps a un effet sur notre consommation d’énergie.

Changer nos priorités permettrait de changer notre rapport à l’énergie.

Nous nous focalisons trop sur le réchauffement climatique et le CO2.

Bertrand Piccard : Soyons logiques autant qu’écologistes. L’anti-décroissance, croyance en la technologie. L’opposé de Parrique (voir infra)

L’entreprise contributive : comment Patagonia a renoncé à un produit phare. Mustela a annoncé qu’ils allaient renoncer aux lingettes, qui représente une part importante de leur chiffre d’affaires.

Réinventons nos rêves. Regardons plus Miyazaki, pensons à ce que Miyazaki prônerait. D’autant que nous allons devoir renoncer à certaines technologies. Nous l’avons déjà fait récemment avec l’interdiction du clonage humain, adoptée mondialement.

Face à des plans américains comme l’Inflation Reduction Act (IRA), Côme estime que si les USA pourraient bien être capables de grandes initiatives en matière climatique, ils risquent fort de ne pas en voir les effets indésirables et les angles morts.

Résumé graphique de la présentation de Côme Girschig, par Nathalie Van Volsom (Constellation)

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Comment sensibiliser la majorité de la société qui ne l’est pas ?

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Rôle et limite de la technologie dans la transition : avis d’experts & retour d’expériences d’entreprises engagées (table ronde)

Damien Adam, député

Un rapport du service de la planification écologique du ministère de l’Ecologie est prévu pour juillet et planifiera la transition bas carbone jusqu’en 2050. Commentaires de la salle : encore un plan ! Pourquoi on n’agit pas déjà sur la base des plans existants ?

Les transports en France représentent 30% des émissions de GES.

Une grande part de nos déplacements sont des déplacements de proximité (moins de 2 km) mais ils sont souvent faits en transports.

Mettre en place une loi ne suffit pas, ce sont les comportements individuels qu’il faut changer (cf Gilets jaunes et taxe carbone). Mais pour changer il faut avoir le choix, et ces possibilités sont aussi le résultat de politiques publiques. Ne pas tout faire reposer sur l’individu..

Changer la perspective. Cesser de faire de l’écologie quelque chose de triste.

Passer de comment on fait des économies carbone à pourquoi on les fait ? La question de la finalité est importante pour réduire de manière globale les émissions.

PDG de Décathlon : quid de la croissance économique, qui est moteur des entreprises, des actionnaires, de la finance ?

Cf Timothée Parrique : « La décroissance est incompatible avec le capitalisme ». Pour lui l’avantage de la décroissance — qui va avec l’abandon du capitalisme —, c’est qu’elle réduit les émissions carbone et l’empreinte écologique im-mé-dia-te-ment. Pour Parrique, le but de l’économie est de satisfaire les besoins concrets (survie, confort...) et rien d’autre.

PDG Décathlon : les actionnaires, si tu leur dis qu’ils ne doivent pas faire de bénéfices, tu vas contre leur logiciel. Tu es obligé de faire avec le système. Tu les réformes de l’intérieur. Et en même temps par sécurité tu prépares un autre système.

Arthur Auboeuf, cofondateur de Team for the Planet : l’entrepreneuriat au service de l’urgence climatique
Notre énorme sujet de base est qu’est ce qu’on fait de notre temps ? A quoi va servir ma vie ?

Lou Welgryn, Head of Product, Carbon4 Finance
Définir de nouveaux indicateurs et pas seulement le PIB.

Question de la salle : faire payer les pollueurs ? Obliger les entreprises à tenir compte des externalités négatives ?

Ce qu’il faut en électricité pour faire avancer toutes les automobiles françaises si elles marchaient à l’électricité. Extrait de la présentation de Côme Girschig

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Léa Falco, membre de Pour un réveil écologique.

Quand on a un cancer on vous donne une chimiothérapie. Une chimiothérapie, c’est radical.
Alors pourquoi oppose t-on le pragmatisme à la "radicalité" des écologistes ? On n’élimine pas un problème sans aller à sa racine ... Faire des choix ou se faire imposer des choix ...

Comme le dit le GIEC, tout se joue entre 2020 et 2030. Il faut commencer maintenant et jouer collectif. Les jeunes générations sont peut-être une génération climat mais il sera trop tard quand elles seront aux manettes.

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Fred : importance du sens du collectif dans des temps difficiles.

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Ce que j’en pense

Pour moi, réussir la transition écologique (et pas simplement climatique) suppose de changer les mentalités et plus encore les comportements, certes mais aussi d’instaurer des obligations et interdictions légales et d’utiliser de la technologie. Mais pour changer les mentalités, il faut convaincre. Et on convainc mieux avec un discours positif et non catastrophiste. Or, avoir un discours positif ne sera pas possible sans un changement d’idéologie. Donc le changement de modèle économique n’est pas une option. Penser uniquement profit et croissance n’est plus possible.

Des présentations comme celle d’Emma Haziza qui rappelle que l’eau ne disparaît pas, qu’on peut recréer son cycle, doivent nous faire prendre conscience que :

  1. tout n’est pas et ne sera jamais perdu. Dire : c’est foutu est non seulement mauvais pour les efforts mais irréaliste. Tout ce qui sera fait aura un effet bénéfique, même limité. 0,1° de plus ou de moins, ça compte
  2. la clé est dans nos habitudes, nos comportements et nos têtes.

Un changement quasi-idéologique est nécessaire. Volontaire ou contraint et forcé, il va se faire. Et comme les citoyens et les entreprises des pays développés sont enfin confrontés à un réchauffement agressif qui fait mal et qui met la vie en danger, ils vont peut-être changer de préférence et choisir la vie, le ralentissement et l’économie de moyens/le recyclage systématique au lieu du confort, de la puissance, de la vitesse et du gaspillage. En tout cas, ils vont chercher à éviter les pires conséquences.

La meilleure preuve en est que les représentants de huit cabinets de conseil transcrivent le programme de Jean-Marc Jancovici pour décarboner la société. Ils participent actuellement à une dizaine de groupes de travail. Les géants de l’audit EY, Wavestone et Sia Partners côtoient des sociétés spécialisées dans la transition écologique. Si les consultants se mettent à l’école de JMJ, où va-t-on ? ;-) Les récents étés fournaises feraient-il réfléchir les entreprises ? On a droit à l’espoir.

Si seulement on pouvait limiter les dégâts dans cette transition qui va s’imposer que ça plaise ou non ...

Côté juridique et technologie à la fois, pourquoi, dès maintenant, la Commission européenne ne cherche t-elle pas, par exemple, à rendre obligatoire une part majoritaire de composants recyclés dans tous les équipements électriques etélectroniques ?

Emmanuel Barthe