Les données publiques des départements bientôt disponibles pour les opérateurs de bases de données commerciales
C’est la conséquence du droit à la réutilisation des informations publiques
Un article bien informé signalé par le compte Twitter de Twice Thinking, un archiviste blogueur, et la veille des Archiveilleurs :
Les départements rédigent des licences / H. Girard, site web de la Gazette des communes 12 août 2010
A la mi-juillet, les Archives départementales du Bas-Rhin et celles de la Sarthe ont publié sur leur site web des contrats de licence pour la réutilisation des données publiques. D’autres, comme la Meurthe-et-Moselle, s’apprêtent à le faire. A court terme, tous les conseils généraux vont devoir délibérer et rédiger ce type de document, pour être en mesure de répondre aux sollicitations d’opérateurs privés. Tel Notrefamille.com : cette entreprise, éditrice du site de recherches généalogiques Genealogie.com, demande aux départements, depuis plus d’un an, ici les fichiers numériques des cahiers de recensement, là ceux des registres d’Etat civil. C’est l’effet, tardif, de la transposition, en 2005, en droit français de la directive sur la réutilisation des informations publiques. [1]
Les archivistes dénoncent le risque de « fichage des individus » :
« Une société de généalogie commerciale vient de mettre en demeure les Départements de lui fournir les fichiers numériques des recensements de population, des registres paroissiaux et d’état civil et des registres matricules militaires, des origines jusqu’aux années 1930, et les a avertis, par courrier, que sa demande s’élargirait à tous les documents nominatifs à fort contenu généalogique potentiel : registres d’écrou des prisons, listes électorales, listes d’étrangers et de réfugiés des XIXe et XXe siècles ; cartes d’ancien combattant 1914-1918 avec photographie ; cartes d’identité de 1940, avec photographie ; registres d’entrée des hôpitaux, notamment psychiatriques ; fichiers de camps d’internement et de déportation liés à la guerre 1939-1945, fichiers juifs …
Le projet affiché par cette société est de constituer la plus grande base nominative jamais réalisée sur l’ensemble de la population française jusqu’au début du XXe siècle, comportant plusieurs centaines de millions de données, indexées (patronymes et autres informations disponibles) et reliées aux images correspondantes, sous des aspects qui touchent non seulement l’identité, mais aussi le domaine médical, pénal, fiscal, judiciaire... Pour les seuls actes d’état civil, cette base concernerait plus d’un milliard d’individus, dont des personnes évidemment encore vivantes. Sur la base de documents certes communicables de plein droit au regard de la loi, ce projet, par sa couverture géographique nationale et par ses caractéristiques technologiques (indexation patronymique systématique, rapprochement des données, entrecroisement de fichiers), aboutit à ficher toute la population française, en exploitant des données nominatives d’un grand poids juridique.
Si la concentration des données publiques nominatives et leur indexation sont autorisées, il sera possible à terme, en payant un abonnement et à partir d’un nom tapé dans un moteur de recherche, de connaître les personnes ayant porté ou portant encore ce nom et ayant connu, soit elles-mêmes, soit leurs ascendants directs, des ennuis judiciaires, des maladies mentales, des parcours sociaux ou politiques pouvant leur être opposés… Le profil familial d’un citoyen pourra ainsi être reconstitué et rendu accessible à tous dans toutes ses facettes (renseignements médicaux, données liées à la sexualité, instabilités matrimoniales, internements psychiatriques, incarcérations, positions militaires…). »
L’article complet de la Gazette des communes est ici. Lire aussi le complément apporté par le blog de Twice Thinking : « Les Archives départementales du Bas-Rhin, rappelons-le, viennent de mettre en place des licences de réutilisation, dont des licences payantes en cas de réutilisation commerciale. La directrice revient sur les modalités et les raisons de ce choix. Avec un argument qui donne à penser : "Je crains, et je suis très loin d’être la seule à le penser, que les services d’archives qui n’agiront pas ainsi (ne se doteront pas de règlement et de licences de réutilisation) ne se voient contraints de remettre gratuitement toutes leurs images aux entreprises privées qui les solliciteront." »
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Les données publiques des départements bientôt disponibles pour les opérateurs de bases de données commerciales
Jean signale aussi la 2e édition de l’étude de Lift France :
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