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Le problème de la conservation des données publiques juridiques
Combien de temps l’administration et les assemblées conserveront-elles leurs archives papier et en ligne ?

Supression d’archives, suppression de versions papier

Un message du 17 septembre 2004 sur la liste Juriconnexion à propos de l’indisponibilité d’une note d’information publique de la Banque de France de 1983, laisse à penser que la Banque de France considère qu’il est inutile qu’elle conserve plus de 20 ans ses propres revues. Quelque temps après, on apprend sur cette même liste que le Bulletin officiel des impôts (BOI) ne sera plus publié au format papier, ce qui est déjà le cas, depuis le 31 août 1999, des débats et questions du Parlement européen (JOCE/JOUE édition C E). Quant au BO du ministère de l’Intérieur, sa version en ligne, à l’occasion de la nouvelle version du site, perdit quelques années de recul.

Société de l’information et économies budgétaires

Des justifications à ces suppressions existent, elles sont connues :

  • notre société et notre économie sont, de plus en plus, une société et une économie de l’information. Elles créent de plus en plus d’informations et de documents, tant papier que numériques. Les coûts de conservation s’élèvent avec l’accroissement de cette masse. En même temps que l’information se périme de plus en plus vite : au bout d’un an — voire six mois — ou deux, selon les matières, une recherche de jurisprudence est à refaire en entier plutôt que de la reprendre et la mettre à jour.
    Or il est difficile de prévoir les demandes/recherches futures, on a juste quelques idées. Il faut donc trancher de manière forcément imparfaite, ce qui signifie toujours des intérêts lésés
  • les exigences d’économies budgétaires sont de plus en plus nettes tant dans les Communautés européennes que dans l’administration française.

Les vraies questions

Voici les vraies questions :

  • quid de la conservation *à long terme* des archives *papier* des juridictions, exécutifs et assemblées ? Nous ne parlerons même pas ici de la conservation des archives numériques, à l’heure où, pourtant, aux Etats-Unis, l’éditeur officiel fédéral (GPO) prépare activement un système de gestion du cycle de vie des documents numériques fédéraux (Future Digital System) pour décembre 2007 [1]
  • et problème encore plus aigü, le Sénat et l’Assemblée nationale vont-ils conserver en ligne indéfiniment les travaux préparatoires des lois ? En effet, depuis la mise en ligne de leurs sites, très peu de personnes sont restées abonnées à leurs documents et encore moins les conservent sur une longue durée.

Sur la première question, voici des exemples des limites de la conservation des décisions de justice judiciaire (cours d’appel, tribunaux d’instance et de grande instance) :

  • au bout de 3 ans, plus de conservation dans les locaux même des greffes des juridictions. D’où un délai supplémentaire d’obtention
  • délai légal de conservation par les services eux-mêmes (sur place ou pas trop loin) : 30 ans, puis conservation en principe indéfinie par les archives départementales. A partir de 30 ans, il est donc beaucoup difficile et beaucoup plus long de se procurer la jurisprudence archivée : il faut aller sur place ...
  • pour les archives numériques, pas de politique claire et forte, rien ne semble vraiment organisé.

Exemple aussi avec les limites de la conservation réelle des recueils d’actes administratifs (RAA) : beaucoup ne sont plus envoyés par les préfectures (papier) [2] mais simplement publiés en ligne. Or, il n’existe pas de portail officiel central des RAA et leurs changements d’URL sont fréquents ... Quid en cas de disparition d’un RAA en ligne qui n’a pas été imprimé par les chefs lieux [3] ?

Pour mieux comprendre les enjeux, voici les règles légales d’archivage — y compris les durées légales de conservationpour les documents officiels, ceux des juridictions et ceux des autorités locales :

Emmanuel Barthe
documentaliste juridique

Notes

[2L’obligation de conservation par les communes a été supprimée pour les communes qui ne sont pas chef-lieu de canton et les petits chefs-lieux de canton dont la population est inférieure à 2000 habitants http://www.territorial.fr/home/arch.... De plus, la circulaire en question, très courte, laisse donc aux seuls chefs lieux de cantons le soin de conserver au delà de 10 ans les RAA des préfectures.