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Officiellement encouragé, mal aimé en pratique

Le droit comparé : un atout à développer
Développer le droit comparé et l’usage de l’anglais pour mieux diffuser le droit français

Dans un point de vue publié au Recueil Dalloz [1], le comparatiste Olivier Moréteau, professeur à Lyon III [2] rappelle les difficultés que rencontrent les études de droit comparé en France et propose quelques remèdes.

Ses propos me font penser à quelques réalités déjà très internationales du métier de documentaliste juridique.

Quelques morceaux choisis et mes réactions éventuelles :

« Notre culture juridique française reste très ethnocentriste. »

« Nous faisons les frais aujourd’hui [d’une attitude de repli sur soi, voire même d’une certaine arrogance], à l’heure où la construction européenne et une mondialisation galopante imposent la connaissance et la maîtrise de plusieurs systèmes juridiques. »

Les documentalistes juridiques anglo-saxons connaissent bien un type de poste impossible à trouver ici en France : Foreign & International Law Librarian, dont voici juste un exemple.

« Nos bibliothèques juridiques [sont] d’une pauvreté indigente s’agissant de tout ce qui est publié hors de France, surtout en langue étrangère. »

Je ne pense cependant pas que la Bibliothèque Interuniversitaire Cujas soit à englober dans ce reproche.

« Seconde proposition : acceptons les travaux en langue étrangère, surtout quand il s’agit de l’anglais, que le juriste du XXIe siècle devrait savoir maîtriser tout comme celui d’antan savait le latin. »

On exige souvent l’anglais pour les postes de documentalistes juridiques en cabinet d’avocats. Et je dois plusieurs fois par semaine faire des recherches en anglais sur le Web ou m’adresser en anglais à mes libraires et éditeurs étrangers.

« Quand aux défenseurs de la francophonie avec lesquels j’ai l’honneur d’agir, les plus intelligents d’entre eux ont enfin compris que la promotion de notre langue passe aussi par la diffusion de notre pensée par le truchement des langues étrangères, notamment la langue anglaise. »

C’est typiquement ce genre d’argument qui a motivé les Québécois pour créer le Grand dictionnaire terminologique (GDT), ce magnifique dictionnaire de langue anglais-français, français-anglais gratuitement consultable sur le Web.

« Une étude récente du Conseil d’Etat [3] le montre clairement : il y va de la survie de notre tradition juridique qui, si elle ne sait se nourrir à l’extérieur, finira par peiner à se renouveler et souffira d’isolement. Il y va aussi du rayonnement de notre culture juridique qui, sans le recours aux langues étrangères et notamment à l’anglais, sera insuffisamment diffusée, deviendra difficile à connaître [...]. »

Emmanuel Barthe
documentaliste juridique

Notes

[1Ne tirez pas sur le comparatiste / Olivier Moréteau, Recueil Dalloz n° 7 du 17 février 2005 p. 452

[2Professeur à l’Université Jean Moulin Lyon III, directeur de l’Institut de droit comparé Edouard Lambert (IDCEL) et du Campus numérique Multidroit, Visiting Professor Boston University School of Law, Senior Fellow The University of Melbourne.

[3L’influence internationale du droit français, La Documentation française, 2001, disponible en texte intégral au format PDF sur le site de la Bibliothèque des rapports publics (BRP).