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Si je peux respectueusement objecter

L’iPad n’est pas un outil de travail pour les "knowledge workers" ...
... mais pour les "managers"

L’iPad d’Apple est un bel objet, au lancement commercial très réussi, au marketing redoutable. C’est *la* tablette tactile du moment, le top du top.

On m’en a offert un. Un très bel objet et un chouette cadeau — je fais des envieux [1].

Pourtant, dans la satisfaction promotionnelle ambiante, mon expérience détonne un peu. Disons que je voudrais apporter des nuances importantes à un discours louangeur sur les tablettes numériques en général et l’iPad en particulier.

Les plus

 Pour les managers et les seniors, l’iPad devrait — voire même est en train de — les réconcilier avec l’informatique. En effet, tout comme un bloc papier, on peut le montrer facilement à son voisin, il se prête, et il s’utilise sans formation ou presque.
 En ce qui me concerne, pour l’instant, iPad = machine à afficher des photos (nouvelle version de l’album photo et du cadre photo), à jouer mes morceaux MP3, à lire le journal et à consulter éventuellement le trafic, la météo et Wikipedia, le tout à la maison. Pourquoi ? Simplement parce que :

  • il démarre plus vite qu’un ordinateur "classique" [2]
  • il peut se passer de main en main
  • il reste allumé plus longtemps qu’un ordinateur portable (10 heures contre 3-4 heures)
  • et il a un écran d’une qualité, d’une définition insurpassables, en dehors des autres produits de la famille Apple bien sûr.

Donc mes filles sont super contentes — d’autres aussi, bien sûr. La plus jeune a même trouvé moyen de "planter" l’appli Photos en tentant de lui faire faire quarante choses en même temps [3]. Si ça vous arrive, avant de réinitialiser entièrement et de A à Z la "bête", allez voir cette page web-ci : How to Restart, Force Quit and Reset the iPad, iPadintosh 4 avril 2010.

Chromebook

Mais, car il y a des "mais"

  • l’iPad glisse, sa prise en main de mont point de vue est "limite" : pas le moindre endroit où caler ses doigts sur son dos argenté, cette coque lisse et bombée. Pas comme la Eee Pad Transformer d’Asus
  • la frappe est lente, très lente pour qui est habitué aux claviers ergonomiques et "en dur" des PCs portables et des Blackberry. Taper pour faire apparaître le clavier, retaper cette fois sur une touche spéciale du clavier chaque fois qu’on veut saisir un chiffre ... Oui, je sais, Apple vend un petit clavier qu’on peut transporter avec l’iPad. Mais dès lors, l’iPad n’est plus une véritable tablette et perd une partie de ses avantages. Un netbook/miniportable comme la série des Eee-PC ou celle des Libretto de Toshiba, ferait alors presque jeu égal, les fonctions tactiles mises à part
  • le système de pointage par les doigts est d’une imprécision effarante pour qui est habitué à la souris et aux raccourcis clavier et le système de loupe [4] ne compense cela que très imparfaitement. Sélectionner du texte nécessite quatre opérations distinctes avec vos doigts (4 !) au lieu du simple et beaucoup plus rapide et plus précis "cliquer-glisser" à la souris
  • naviguer sur le Web impose un redimensionnement permanent des pages afin de mieux voir, de pouvoir cocher des cases etc.
  • le système de navigation dans les appli est trop limité pour le "geek" que je suis
  • la capacité de 32 Go de l’iPad est de nos jours très limitée, surtout si on le considère comme une machine multimédia, notamment comme un visionneur de vidéos et de films. On ne peut même pas y coincer la totalité des photos et MP3 d’un honnête "geek"
  • globalement, pour moi, ce n’est pas un outil de productivité, il ralentit presque toutes les opérations.

L’iPad peut être un véritable outil de travail, selon mon expérience, pour les grands patrons, cadres de direction, commerciaux, managers et démonstrateurs, des personnes qui ne tapent jamais plus de quelques lignes d’affilée. Mais il n’est à mon sens pas vraiment fait pour l’armée des "knowledge workers", ceux qui doivent rédiger/saisir/chercher l’aiguille dans la meule de foin/organiser en détail/dessiner/tracer, et autres travailleurs intellectuels du tertiaire, sauf s’il vient en complément d’un poste fixe et d’un portable, ou d’un portable avec sa station d’accueil ("dock") ou encore s’il remplace le BlackBerry. Pour reprendre les termes de Matt Rosoff, journaliste à Business Insider : « Pour la plupart des travailleurs, les tablettes n’offrent aucun avantage particulièrement net en matière de productivité » [5]. Certaines limites très gênantes de la saisie sur iPad — même avec le vrai petit clavier spécial ("dock") — sont détaillées dans un long billet sur le blog de Binary Bonsai [6].

Cela dit, voici le retour d’un vrai geek et knowledge worker qui, lui, en est complètement fan. Il code même un peu sur son iPad, c’est dire [7]. Le problème, c’est qu’il n’explique pas comment il fait pour tenir la machine, ni comment il se débrouille avec le clavier virtuel et ce si petit écran une fois ce clavier déployé. Je suppose que la portabilité de l’iPad [8] est ce qui le motive à l’utiliser comme son ordinateur de base.

Pour moi, le véritable outil de travail mobile (mais pas le seul [9]) du knowledge worker serait un ordinateur portable puissant, à relativement grand écran et surtout léger (moins de 2 kg batterie incluse). Par exemple, un MacBook Air (entre 1,06 et 1,32 kg seulement !), un Samsung Chromebook (1,3 kg, pas plus) voire un Acer Aspire TimelineX (entre 2,1 et 2,5 kg, lui, toutefois).

Pour consulter vite fait la météo, mon journal favori ou encore Wikipedia le matin avant de partir au boulot, pour montrer des vidéos drôles à un ami de passage ou consulter un plan/une carte vite fait [10], l’iPad est parfait, ça oui :-) Mais celui que je met dans la poche dédiée de mon sac pour travailler dans le train ou prendre des notes en réunion, c’est mon Blackberry ou mon Acer Aspire ;-) [11]

Emmanuel Barthe

Notes

[1Un grand merci à celles et ceux qui ont pensé à me l’offrir.

[2Quand je dis qu’il démarre plus vite, soyons précis : en fait, il sort plus vite de sa veille qu’un PC ne sort de la sienne. Mais si on l’éteint totalement (laissez votre doigt appuyé sur le bouton marche/arrêt au moins 5 secondes puis validez) alors son démarrage prend pas loin de 20 secondes ...

[3On peut ouvrir deux applications et passer de l’une à l’autre. Mais les iPhone et iPad ne sont pas très axés sur le multi-tâche.

[4Laisser son doigt appuyé au même endroit quelques secondes déclenche un grossissement local du texte et du curseur, tel une loupe.

[5« Tablets don’t offer any particularly obvious productivity benefits for most workers ». How Does Cisco Expect To Sell Big Companies A $750 Android Tablet ? / Matt Rosoff, Business Insider 29 juin 2011.

[7iPad, Therefore I Am / Rui Carmo, Tao of Mac 12 septembre 2010.

[8Le poids de l’iPad ? 680 g. Même pas 1 kg. Le poids d’un gros livre relié.

[9Ne serait ce que pour des problèmes de sauvegarde des données et de risque de vol.

[10Mais pas l’imprimer ...

[11Ils ont chacun leur poche dédiée.