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Données publiques : 16 propositions pour une politique nationale ambitieuse des données publiques
Un rapport audacieux

La Documentation française vient de publier sur son site le rapport rédigé par Mines Paris Tech (autrement dit, l’Ecole des Mines-Ponts) pour le ministre en charge de l’économie numérique et la Délégation aux Usages de l’Internet dans le cadre du portail Proxima Mobile de services aux citoyens sur terminaux mobiles.

Les données publiques au service de l’innovation et de la transparence - Pour une politique ambitieuse de réutilisation des données publiques, juillet 2011.

Présentation par l’éditeur :
Le présent rapport se penche sur le sujet de la réutilisation des données publiques (Open Data), collectées et produites par l’administration et le secteur public. Le rapport rappelle les enjeux de cette réutilisation, facilitée par les évolutions technologiques, politiques et économiques récentes, et analyse les opportunités offertes pour l’administration, ainsi que pour l’économie numérique. Le rapport propose ensuite un état des lieux de la situation en France, dont le cadre juridique actuel, et aborde les premières expériences d’ouverture des données publiques. Il examine enfin les conditions susceptibles d’encourager la réutilisation des données publiques : répondre aux contraintes techniques de l’ouverture des données, en gérer la complexité juridique, anticiper son impact éventuel sur les institutions publiques, et mettre en place les modèles économiques les plus propices à encourager l’innovation. Seize propositions viennent illustrer le rapport.

Beaucoup de ces propositions font (bon) sens pour les "geeks" et les utilisateurs de données publiques : appel à la communauté Internet des données publiques, utiliser des formats réexploitables, encourager le développement d’applications ...

Mon principal point de désaccord — et presque le seul — avec ce rapport porte sur la proposition n° 8.1 : Dessaisir l’Etat du rôle de valorisation des données publiques.

Les collectivités productrices des données seraient elles par nature incapables de s’occuper de mettre en valeur et réutiliser leurs propres données ... Leur action serait elle nocive ? L’INSEE doit elle cesser de publier toute revue ou rapport ? L’intervention de la puissance publique n’est pas nocive par nature pour les données publiques et leur diffusion, loin de là. Les exemples d’EUR-Lex ou de Legifrance l’ont montré : ces sites tenus par les exécutifs européen et français respectivement ont beaucoup fait pour améliorer la connaissance et la diffusion du droit.

Je voudrais aussi apporter un bémol à la proposition 8.2 : Généraliser la gratuité pour les données nouvellement mises à disposition.

Attention à ne pas "brader" certaines données publiques. Ou, sinon, à assurer par d’autres moyens le financement des producteurs publics de ces données. Car d’une part, qu’elles aient été payées par l’impôt n’est pas si évident, entre déficits publics et RGPP. D’autre part, certains établissements comme l’IGN ou la RMN auraient bien du mal à poursuivre leurs missions sans le financement venant de la vente de leurs données et de leur mise en valeur ... La gratuité totale est un leurre. Pour autant, des licences trop chères tendent à exclure les petits concurrents et les entrants sur le marché. A mon avis, un équilibre est nécessaire.

Emmanuel Barthe
documentaliste juridique

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Seize propositions pour une politique nationale ambitieuse des données publiques

Voici les « seize propositions pour une politique nationale ambitieuse des données publiques », suivies éventuellement entre crochets de mon avis personnel, qui s’il trouve le rapport positivement audacieux, n’en est pas moins pas d’accord sur certains points.

1. Formaliser les bonnes pratiques de diffusion des données publiques attendues par la communauté des réutilisateurs :

  • Expliciter l’effort minimal attendu.
  • Assurer la formation des agents et leur accès à des guides synthétiques
    explicatifs. [Il y a du travail, en effet.]
  • Simplifier les formats de diffusion.

2. Mettre en cohérence les conditions légales de réutilisation des données issues de sources différentes :

  • Etablir une licence gratuite par défaut.
  • Encourager un marquage graphique des droits de réutilisation.

3. Encourager l’utilisation de formats facilement réexploitables, qui respectent les normes d’interopérabilité et de "lisibilité machine" :

  • Privilégier les formats ouverts respectant les normes d’interopérabilité.
  • Communiquer sur l’importance des formats réexploitables auprès des agents.
  • Maintenir une liste de formats correspondants à ces critères.

4. Faire en sorte que chaque contrat public clarifie à l’avenir les droits de réutilisation liés aux données produites dans son cadre :

  • Clarifier les droits de réutilisation de données dans les contrats publics.
  • Etablir des bonnes pratiques et des clauses types.
  • Elargir le périmètre des données réutilisables aux ressources essentielles.

5. Faciliter l’enrichissement des données et l’intégration de corrections éventuelles par la communauté :

  • Faciliter l’intégration des métadonnées.
  • Permettre l’enrichissement collectif des jeux de données.

6. Impliquer des acteurs publics pilotes dans les projets de recherche sur le Web sémantique.

7. Rendre la réutilisation des données gratuite pour toute réutilisation à titre
personnel.

8. Encadrer strictement les cas dans lesquels une redevance est légitime, et charger les producteurs de données d’établir l’absolue nécessité de toute tarification :

  • Dessaisir l’Etat du rôle de valorisation des données publiques. [objection, votre honneur : voir supra]
  • Généraliser la gratuité pour les données nouvellement mises à disposition.
  • Restreindre la tarification à coûts moyens aux marchés matures.

9. Conditionner toute redevance pour réutilisation de données à valeur ajoutée à la mise à disposition gratuite des données brutes qui les sous-tendent.

10. Explorer des conditions alternatives de réutilisation pour laisser carte blanche à l’expérimentation :

  • Explorer les licences gratuites avec partage des conditions initiales à
    l’identique (share alike).
  • Explorer la rémunération par l’accès aux métadonnées.
  • Explorer la rémunération par le service client.
  • Faciliter l’expérimentation avec les Web Services.

11. Impliquer la communauté des réutilisateurs autour de la plateforme
data.gouv.fr
 :

  • Créer un point d’accès unique centralisé et mis à jour automatiquement.
  • Développer une offre grand public qui mette en valeur des applications utiles.
  • Investir dans l’accompagnement de la communauté.
  • Démultiplier le service aux utilisateurs.
  • Organiser des séminaires ou ateliers de travail ponctuels sur les sujets
    techniques d’intérêt pour la communauté.

12. Mettre en place des assises des données publiques et animer la communauté des réutilisateurs :

  • Regrouper l’ensemble de l’écosystème pour des assises des données publiques.
  • Animer la communauté des réutilisateurs d’applications à partir des données publiques.

13. Encourager le développement d’applications à partir des données
publiques
[C’est ce que fait déjà — et avec quel brio — Proxima Mobile.] :

  • Organiser un concours national de développement d’applications.
  • Prendre en compte la réutilisation des données publiques dans les appels à
    projets de R&D numérique.
  • Pérenniser l’offre d’applications créées à partir des données publiques.

14. Intégrer les données publiques et leur réutilisation au débat démocratique [Déjà pratiqué par le site Mon député.] :

  • Communiquer aux administrations l’importance des données pour mettre en
    lumière leurs métiers.
  • Illustrer la réutilisation des données publiques par le développement de
    services aux citoyens.
  • Faire des données et de leur réutilisation un outil d’éclairage du débat public.

15. Développer une stratégie nationale à partir du rôle de coordination des
institutions publiques de la mission Etalab :

  • Mutualiser des solutions de mise en ligne pour les administrations et les
    collectivités.
  • Développer une stratégie nationale pour les données publiques.

16. Elargir le champ de l’Open Data :

  • Elargir le champ de la libre réutilisation des données publiques.
  • Explorer l’application de l’Open Data aux entreprises privées.
  • Développer une stratégie européenne et internationale.