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Soyez prudents

A propos des demandes de documents sur les listes de discussion
Droit d’auteur, spam et politesse

Rendre service est un des fondements du métier de bibliothécaire documentaliste. Et certains documents sont réellement introuvables sans un coup de main.

Mais attention : prendre l’habitude de demander aux autres — sur les forums et les listes de discussion — de trouver à sa place entraîne des risques.

Voici donc quelques "warnings" et recommandations, une sorte de Netiquette de la demande de documents en ligne.

Attention au droit d’auteur

Attention premièrement au droit d’auteur :

  • ne faites jamais une demande publique ou semi-publique de documents soumis au droit d’auteur. C’est une incitation à la copie illégale. La personne qui y répondra, surtout si elle répond publiquement, prendra un risque encore plus grand. Souvenez-vous notamment qu’un message posté à un cercle restreint d’"amis" Facebook peut être interprété par un juge comme une communication publique
  • ne répondez pas, en tout cas publiquement, à une demande de de documents soumis au droit d’auteur
  • limitez vous :
    • aux documents publics comme :
      • les rapports officiels (et encore, c’est plus une tolérance dont il s’agit)
      • les textes officiels ou la jurisprudence (ils ne sont pas soumis au droit d’auteur [1] et ce, sans compter les licences gratuites open data de Legifrance [2] et des sites parlementaires [3])
    • aux documents en licence libre (type Creative Commons) si celle-ci le permet
    • voire aux communiqués de presse [4]
  • attention ! : les discours des hommes politiques, malgré une légende urbaine tenace, ne sont pas librement reproductibles, sauf par la presse et dans le cadre de l’actualité
  • préférez toujours envoyer un lien hypertexte plutôt qu’un document. L’avantage est triple :
    • en cas de doute quant aux droits sur ce document, vous prenez infiniment moins de risques
    • l’antivirus des destinataires risque moins de bloquer votre réponse qu’en cas de pièce jointe (sécurité informatique)
    • si la pièce attachée est grosse — typiquement plus de 5 Mo dans les administrations et plus de 10 Mo ailleurs (voire moins) — votre mail a de bonnes chances d’être bloqué [5].

Choisir un endroit adapté pour poster sa demande

Pas mal de listes de discussion en informatique mais aussi en bibliothèque-documentation consistent essentiellement en demandes et fournitures de documents ou de coups de main. Dans le cas coups de main, je pense notamment, en informatique/Internet en développement, à Stackexchange. Il a été écrit que le seul moment où un employeur ou un client peut savoir ce que vaut réellement le développeur qu’il a embauché, c’est quand le site de Stackexchange est en panne ;-)

En sens inverse, certaines listes, comme la liste Juriconnexion, n’ont pas pour objet principal la demande et la fourniture de documents. Loin de là.

Ne spammez pas — Ou comment demander avec politesse et modération

Attention aussi : ne spammez pas vos correspondants avec des demandes de documents répétées. Choisissez un lieu (ici, une liste) mais aussi des mots adaptés.

Il y a une sorte de déontologie non écrite du documentaliste qui dit que quand on cherche souvent des documents :

1. On commence par appliquer soi-même les bases de la recherche. Pour résumer : cherchez (bien) avant de demander aux autres de chercher à votre place :

  • vérifier soigneusement les bases de données et le Web (OK, peu de gens oublient de le faire)
  • s’adresser à la source. Exemples : le greffe pour une décision de justice, l’organisme décisionnaire pour une décision administrative, l’éditeur pour tout document cité par lui (là aussi, oubli rare)
  • puis "taper" son carnet d’adresses (oubli plus fréquent). Ça c’est crucial. Tout bon professionnel de l’information doit avoir *son* réseau. Utiliser son réseau personnel offre aussi l’avantage de rester discret (cf point infra sur le respect de la confidentialité).

2. Si les étapes précédentes ont échoué, on peut tenter une demande publique sur une liste de discussion ou sur les réseaux sociaux. Les précautions et politesses de rigueur sont alors les suivantes :

  • respecter la confidentialité de ceux qui ont initialement demandé l’information/le document
  • résumer rapidement les recherches précédemment effectuées, histoire de prouver qu’on n’attend pas que la communauté fasse son travail à sa place. C’est d’ailleurs rappelé au point 1 de la FAQ de la liste de discussion Juriconnexion
  • expliquer le contexte de la recherche si nécessaire. Idem : ça fait partie des recommandations de la FAQ de la liste
  • être poli, éviter le style "Bonjour, Alors je cherche ça et j’ai pas trouvé, et je suis super pressé/ée. Vous pouvez me le trouver ?"
  • partager le document trouvé avec la communauté voire expliquer où et comment on l’a trouvé
  • rendre le même service de temps à autre
  • éviter d’encombrer les lieux qui ne sont pas clairement dédiés à ça avec des demandes de ce type, car elles font fuir les contributeurs.

Alternatives utiles

A noter que les réseaux sociaux (Twitter, Facebook, Google+ mais aussi tout réseau social spécialisé) sont en général d’excellents lieu pour des demandes de documents.

Twitter est un lieu courant et assez pratique pour les demandes de documents. Notamment, les journalistes juridiques et les avocats s’y échangent pas mal d’informations et de liens sur les arrêts récents. Cela dit, il vaut mieux éviter d’encombrer sa time line (TL) — et celle des autres — avec 80% de demandes de documents.

Emmanuel Barthe
bibliothécaire documentaliste juridique
modérateur de la liste Juriconnexion de 1998 à 2002

Notes

[1Au regard du droit d’auteur — mais pas du droit des bases de données —, seuls les documents publics juridiques *bruts* (donc non compris les consolidations, les abstracts, les résumés, les analyses et les commentaires, couverts, eux, par le droit d’auteur) sont librement et *gratuitement* reproductibles. Exemples : un texte officiel ou une décision de justice, sans abstract ni commentaire.
Ce principe n’est écrit nulle part : simplement, les textes officiels bruts et les décisions de justice sont considérés comme du domaine public. Et ce, depuis le 19e siècle.
Cf la note de bas de page 83 dans la Recommandation du Forum des droits sur l’internet "Quelle politique de diffusion des données publiques" (14 avril 2003) :

« Cette exception, prévue par aucun texte, résulte d’une construction jurisprudentielle et doctrinale qui tend à estimer que "Les pouvoirs publics, institués pour gouverner, non seulement dans l’intérêt général mais aussi dans l’intérêt de chaque citoyen pris individuellement, ne font point acte de propriété lorsqu’ils créent et promulguent des lois" (formule de Renouard, Traité des droits d’auteurs dans la littérature, les sciences et les beaux arts, 1939 cité par Jean-Michel Bruguière). Cette notion intégrerait "l’ensemble des lois, textes réglementaires, travaux préparatoires et décisions judiciaires ainsi que tous les documents mentionnés à l’article 9 de la loi du 17 juillet 1978" (Jean-Michel Bruguière, "Les données publiques et le droit", Litec, 2002, § 149). »

C’est ce que rappelle la circulaire du 14 février 1994 relative à la diffusion des données publiques (JO Lois et décrets n° 42 du 19 février 1994 p. 2864).
De plus, depuis la décision n° 99-421 DC du Conseil constitutionnel du 16 décembre 1999, "l’accessibilité de la loi" est un objectif de valeur constitutionnelle, ce qui suppose la possibilité de reproduire et de diffuser librement la loi.

[2Page Licences données juridiques du répertoire des informations publiques (RIP) de la DILA.

[3Les sites de diffusion en open data des données de l’Assemblée nationale et du Sénat comprennent les travaux législatifs des députés et sénateurs, donc les rapports et avis sur les projets et propositions de loi, mais pas les rapports d’information parlementaires.

[4Les communiqués de presse sont soumis au droit d’auteur mais en pratique leurs auteurs, justement, apprécient qu’on les diffuse. Sauf, parfois, si c’est pour critiquer leur auteur ...

[5Les messageries des fournisseurs d’accès et les webmails des grands de l’Internet ont une taille maximale de pièce jointe à 20 Mo en moyenne, avec des minima à 5 et des maxima à 50 (voir ce topo sur Vulgum Techus), mais en entreprise, c’est souvent moins.