Déboires financiers de la presse : les journaux reviennent — timidement — vers le modèle payant et Google commence à payer ses partenaires
Enfin !
La presse va peut-être commencer à trouver un début de réponse au problème grandissant de sa rentabilité. Le NY Times expliquait en 2008 qu’un article web lui rapportait 1 dollar en publicité mais lui en coûtait 9 ... Baisse des recettes publicitaires, recul du lectorat et plus récemment crise économique globale, tout concourait à mettre une des sources d’approvisionnement en information fiable des veilleurs, juristes, documentalistes etc. Même les gratuits vont mal [1].
Mais deux signes d’arrêt de l’hémorragie apparaissent. D’une part, les Echos signalaient récemment que Google avait enfin commencé à verser leur part aux organes de presse — comme l’AFP — qui avait conclu des partenariats avec lui pour lui permettre d’indexer et d’exploiter librement leurs contenus en ligne [2].
Avec le nombre de titres américains qui depuis 2008 soit se mettent en faillite, soit abandonnent leur version imprimée et passent au pur en ligne, il était temps ... Pour la presse comme pour les moteurs de recherche. Car à ce rythme, Google n’allait plus bien longtemps avoir de fournisseurs de contenu à sa disposition. Sans contenu, plus de trafic. Et sans trafic, plus de publicité. Or la publicité représente environ 95% des revenus de la firme de Mountain View.
D’autre part, deux articles parus dans la Tribune le 8 avril 2009 [3] sonnent la fin de la récréation (traduisez : gratuité de tout le contenu) :
« En France, éditeurs de journaux et de médias traditionnels font le [...] constat : le modèle gratuit reposant sur des recettes publicitaires, qui semblait s’imposer sur Internet, ne permet pas de financer la production d’information ou de contenus de qualité. D’autant que sur 2 milliards d’euros de dépenses publicitaires en France sur Internet, 800 millions vont à Google et ses liens sponsorisés, et 420 aux annuaires des PagesJaunes. »
« La gratuité sur Internet n’est pas la panacée. [...] Et Didier Quillot, patron du premier éditeur français de magazines, Lagardère Active, a prévenu dans un entretien au Monde [4] : "La génération Internet doit comprendre que ce qui a de la valeur a un prix." Face à un marché de la publicité sur Internet qui tarde à tenir ses promesses et au ralentissement durable de la croissance, les sites de médias reviennent pas à pas vers un modèle payant de l’information en ligne. [...]
Entièrement gratuit et leader sur les sites de presse écrite avec 4,9 millions de visiteurs uniques par mois, le site du « Figaro » réfléchit au lancement d’un espace payant pour certains de ses contenus. La première étape, dans quelques semaines, sera l’accès payant à l’édition du jour en ligne, confie Bertrand Gié, directeur délégué des nouveaux médias du groupe Figaro. »
Emmanuel Barthe
documentaliste veilleur
Notes
[1] Voir notre brève Presse gratuite : le début de la fin ?.
[2] Par son partenariat avec Google, signé suite à une transaction dans son procès avec le moteur de recherche américain, l’AFP voit même une part importante de ses dépèches carrément *hébergées* (i.e. copiées) sur le site de Google.
[3] La Tribune du 8 avril 2009 : Les médias révisent leur modèle Internet / Isabelle Repiton, La fin de la gratuité des contenus ? / Cécile Barbière. Accès réservé.
[4] Didier Quillot : "La génération Internet doit comprendre que ce qui a de la valeur a un prix", propos recueillis par Stéphane Lauer et Xavier Ternisien, Le Monde 7 avril 2009.